Plaidoyer porté par la société civile Tunisienne à la COP 27

L’Association de la Démocratie Locale (ADL-Kairouan, Tunisie), l’Association de la Protection de la Nature et de l’Environnement de Kairouan (APNEK) et l’Association pour la Protection de l’Environnement et le Développement Durable de Bizerte (APEDDUB), en partenariat avec la GIZ (Projet ProtecT), la Commune de Kairouan, la GNDR, le RAED et PACJA, ont organisé, le Samedi 22 Octobre 2022 à Kairouan-Tunisie, une conférence nationale sous le thème « Plaidoyer de la société civile tunisienne porté à la COP 27 ». L’objectif de la conférence nationale est de permettre à la société civile tunisienne de renouveler son engagement à multiplier ses efforts pour lutter contre le changement climatique, de s’exprimer et de se faire entendre auprès de la COP 27, et delà que son message/plaidoyer touche les décideurs, à tout niveau, qu'il les pousse à agir au rythme de la vitesse de succession des désastres climatiques actuels et encourus, avant qu’il ne soit trop tard. La conférence a profité des compétences des personnes ressources suivantes : - M. Mohamed Zmerli, Point focal national tunisien de la CCNUCC- Délégation officielle - M. Hamda Alloui, Responsable de la Planification et du suivi Adaptation CC (UGPO-CC)- Délégation officielle; - Dr. Zouhair Hlaoui, Professeur universitaire-Délégation officielle; - Dr. Adel Hentati, Expert international en environnement et DD. Elle fût dirigée en hybride et facilitée par Mme Afaf Zaddem, Vice-Présidente de l’ADL-Kairouan ainsi qu’assistée et suivie par 43 participants représentant une vingtaine d’ONG tunisiennes, quatre structures médiatiques et trois collectivités locales du Gouvernorat de Kairouan. DÉROULEMENT DE LA CONFÉRENCE NATIONALE Ouverture La conférence a démarré par les mots de cadrage de l’événement et ceux de bienvenue adressés, successivement, à l’assistance de la part de M. Seif Derouiche, Représentant la GIZ et Coordinateur national du projet ProtecT, de Mme. Najoua Bouraoui, Présidente de APEDDUB et du réseau PACJA, de M. Youssef Nouri, Président de l’ADL-Kairouan et de M. Youssef Khélif, Président de l’APNEK. L’ouverture officielle de la conférence nationale fût donnée par M. Radhouen Bouden, Maire de la ville de Kairouan. Plénière 1 La conférence s’est poursuivie par une première plénière dédiée aux défis et aux enjeux des changements climatiques, au cours de laquelle six communications sont, respectivement, présentées par : * M. Hamda Alloui qui a rappelé et informé l’assistance de la raison d’être et de l’acheminement évolutif conduisant à la promulgation de la convention sur les changements climatiques ainsi que des étapes de l’adhésion ferme de l’Etat tunisien à cette dernière à travers, notamment, son assiduité de participation dans les différentes Conférences des parties (COP) et son application distinguée dans l’élaboration et la présentation à ces dernières les rapports de contribution nationale déterminée(CND). * M. Mohamed Zmerli a exposé et explicité les enjeux caractérisant la COP27 en rapport avec les trébuchements constatés à la COP26 et les résolutions ayant découlé de cette dernière, notamment, en termes d’engagements des pays développés pour le financement de la lutte contre les changements climatiques, dans sa double dimension adaptation et atténuation. Comme priorités de la COP27, M. Zmerli ajouta à cet aspect de fonds à déployer la nécessité que tout et chacun des pays signataires rehausse ses ambitions en matière de réduction des émissions et assure, à vrai, la transition énergétique requise malgré tout conflit géopolitique survenu. * M. Radhouen Bouden, Maire de la ville de Kairouan, a axé sa communication sur l’intérêt que le Conseil municipal de Kairouan n’a pas cessé d’accorder à la résilience du territoire communal en rapport avec les risques causés par les changements climatiques. Il énuméra les initiatives en cours et déjà entreprises par la Commune de Kairouan, en partenariat avec plusieurs acteurs nationaux et étrangers, pour contribuer concrètement à l’atténuation desdits risques à Kairouan. Parmi celles-ci, il présenta l’exemple portant sur l’élaboration d’une stratégie de gestion intégrée et durable des déchets ménagers et assimilés-horizon 2030 et ce en partenariat avec l’association APNEK bénéficiaire de l’appui financier de l’US Forest/IP, l’exemple d’implémentation d’un projet pilote de compostage des déchets organique en partenariat avec la GIZ et la municipalité de Darmshtag en Allemagne et l’exemple du projet ACTE entrepris en partenariat avec l’ANME et la coopération suisse en vue de la promotion de la transition énergétique à la Commune de Kairouan à commencer par les bâtiments, biens et installations relevant de cette dernière et ce, sur la base des résultats d’un audit énergétique préalablement entrepris. * Dans sa communication en ligne du Caire, Dr. Emad Adly, Président du RAED et coordinateur général de la société civile à la COP27, a résumé les défis arabo-africains au sommet 27 du climat en six points successifs à savoir : le lien incontestable entre l’option d’adaptation et la sécurité alimentaire en rapport, notamment, avec la rareté de l’eau ; la considération irréfutable quant aux dommages et pertes occasionnées ; la nécessité de rehausser la mise dédiée au financement du climat ; le besoin urgent d’un transfert technologique élargi et approprié ; l’attention et le veille sérieux par rapport aux phénomènes d’exode et de déplacement des populations et enfin, l’obligation de renforcer l’appui de la société civile pour qu’elle contribue comme il se doit à la lutte contre le changement climatique. * De sa part, Dr. Najoua Bouraoui, co-point focal national du GNDR et Présidente du réseau africain PACJA, a traité dans sa communication la notion de justice climatique sur les plans définiton, législatif, mœurs et prérogatives liés aux fondements régissant la convention du changement climatique. En rapportant toutes ces questions à l’échelle africaine, l’intervenante a conclu qu’il est plus que jamais temps de rétablir la justice climatique dans le continent du fait qu’il est le plus affecté par les changements climatiques. * Par manque de joignabilité en ligne avec M. Adessou Kossivi du point focal africain du réseau mondial pour la réduction des risques des désastres (GNDR), M. Youssef Nouri, co-point focal national dudit réseau, a rappelé que GNDR regroupe 1468 organisations de la société civile dans 127 pays qui travaillent ensemble pour construire un monde plus résilient et que GNDR reconnaît le changement climatique comme un facteur de risque majeur qui sape les plans, programmes et stratégies de développement et pousse ceux qui sont en première ligne du risque, à l’instar des pays africains, à des niveaux de vulnérabilité plus élevés. M. Nouri ajouta que GNDR appelle, en urgence, les États membres et les décideurs de la COP27 à : 1. Intégrer les pertes et préjudices (en tant qu’impacts résiduels du changement climatique qui vont au-delà de l’adaptation) dans les stratégies de développement, les plans et les contributions déterminées au niveau national (CDN) propres à chaque pays ; 2. Renforcer la collaboration entre les acteurs du climat et de la réduction des risques de catastrophe au niveau national, avec un sens élevé de la reddition de compte envers les populations vulnérables et les plus exposées ; 3. S’engager, aux niveaux international et national, à financer les pertes et les préjudices au niveau communautaire de manière pan sociétale, avec un mécanisme de financement clair et durable. Cet engagement devrait faire partie des résultats de la COP27 ; 4. Veiller à ce que les fonds d’adaptation destinés aux pays en développement soient efficaces – en particulier pour ce qui concerne le genre et le handicap ; 5. S’engager en faveur d’une planification efficace de l’utilisation des sols dans le cadre de la réduction des risques de catastrophe, de l’adaptation au climat, des pertes et des préjudices. Discussions/Echanges Les discussions et les échanges entrepris étaient à la fois intenses et constructifs avec les intervenants et les personnes ressources présentes à cette conférence nationale. A leur fin, les acteurs de la société civile tunisienne n’ont pas manqué d’exprimer, en résumé, leurs :  Crainte, de plus en plus accrue, des dangers manifestes et encourus par notre planète terre à cause des maux destructeurs accélérés et engendrés par le changement climatique, notamment, dans les pays en développement sensés les plus affectés et à écosystèmes fragiles et vulnérables ;  Indignation contre certains sceptiques qui désapprouvent les résultats et les avertissements des études de la recherche scientifique confirmant lesdits dangers du changement climatique ;  Frustration face à l’échec continu des gouvernements à parvenir à des résultats significatifs pour maintenir la température du globe à 1,5°C de réchauffement ;  Indignation contre l’irresponsabilité et l’impunité toujours observée envers les pays et les acteurs économiques de tout genre faisant prévaloir leur suprématie géopolitique et leur égoïsme pécunier sur le sort malin auquel est exposée toute l’humanité sur terre ;  Volonté et leur engagement inlassables pour défendre le droit d’existence et de prospérité des générations présentes et futures, en toute solidarité avec tout bienfaisant et militant pour l’adaptation aux effets néfastes du changement climatique et pour, notamment, l’atténuation urgente de ces derniers. Les ateliers de travail Après la plénière 1, les participants(es) à la conférence se sont subdivisés(es) en quatre ateliers de travail et de réflexion ayant porté sur les thématiques suivantes : - Les engagements des pays développés pour assurer la transition énergétique et la justice climatique ; - Engagements des pays développés pour l'adaptation et la résilience aux changements climatiques afin de garantir la préservation et la sauvegarde de la biodiversité et des écosystèmes naturelles et de promouvoir les domaines de l’enseignement ; - La société civile africaine (Arabe, africaine et Tunisienne), face aux défis du changement climatique ; - La Finance climat et défis pour les financements de l'adaptation et des pertes et dommages, et à l’indemnisation des populations vulnérables touchées par les impacts des changements climatiques. Plénière 2, restitution et concertation sur les résultats des travaux des ateliers Les résultats des travaux des ateliers sont restitués par leurs rapporteurs respectifs et sont concertés et débattus en plénière pour enfin s’accorder sur le contenu et la formulation du plaidoyer de la société civile tunisienne porté à la COP27, via la délégation nationale officielle à cette dernière. Le plaidoyer en question a fait appel à : 1. Rétablir la confiance entre les pays signataires de la convention cadre, en exigeant de tous et de chacun à honorer ses engagements antérieurs, tout en rehaussant toutes les ambitions en la matière ; 2. Fournir le financement nécessaire et adéquat pour une transition énergétique juste et équitable en assurant le transfert technologique adapté aux conditions et aux spécificités du climat des pays africains et arabes et en impliquant la société civile et les populations vulnérables dans tous les aspects et processus décisionnels visant la transition énergétique juste ; 3. Garantir les financements suffisants et nécessaires à la compensation des pertes et des dommages (L & D) liés au changement climatique dans les pays affectés et en faire rubrique contraignante dans les rapports de Contributions Nationales Déterminées (CND) ; 4. Exiger la création d’un mécanisme onusien chargé de l’audit technique et scientifique, in-situ, des CND ainsi que du suivi et de l’évaluation périodiques des dégâts causés par les changements climatiques ; 5. Donner priorité aux pays vulnérables et affectés, à l’instar des pays arabes et africains, situés sur le Front des Risques Climatiques, en matière d’allocation de fonds dédiés à l’adaptation et, notamment, à l’atténuation des effets du changement climatique ; 6. Faire preuve concrète et permanente de la volonté des pays signataires pour une implication efficace et efficiente des acteurs de la société civile dans le combat du changement climatique.